Plage blanche

« Mon dernier rapport avant l'atterrissage est maintenant terminé.
Nous sommes sur pilote automatique, entre les mains de l'ordinateur.
J'ai bordé les membres de mon équipage pour un long sommeil et je vais bientôt aller les rejoindre.
Dans moins d'une heure, nos six mois hors du cap Kennedy s'achèveront.
Six mois dans l'espace lointain selon notre temps du moins.
Selon la théorie du Dr Hasslein sur le temps lors des voyages à la vitesse de la lumière, la terre aura vieilli de presque 700 ans depuis que nous l'avons quittée tandis qu'on a à peine vieilli.

Peut-être !

Ce qui est sans doute vrai est que les hommes qui nous ont envoyés faire ce voyage sont morts depuis longtemps.
Vous qui lisez mes mots aujourd’hui êtes une espèce différente.
Une espèce meilleure j’espère.

Je quitte le XXe siècle sans regrets mais une dernière chose si quelqu’un m’écoute du moins, rien de scientifique, c’est purement personnel.
Vu d’ici tout semble différent.
Le temps est courbe, l’espace est infini.
Ça écrase l’égo humain.
Je me sens seul.
C’est à peu près tout.

Dites-moi pourtant, l’homme, cette merveille de l’univers, ce paradoxe glorieux qui m’a envoyé visiter les étoiles, se bat-il encore contre son frère ?
Est-ce qu’il laisse toujours mourir de faim les enfants de son voisin ? »

Extrait de propos prononcés par le personnage de Taylor dans son vaisseau spatial au début du long-métrage La Planète des singes, Franklin Schaffner, 1968.

En 1968, Schaffner offrait au monde une séquence finale, dans sa version de La Planète des singes, où Taylor (Charlton Heston) et Nova (Lina Harrison), découvrent que la plage sauvage sur laquelle ils se trouvent n'est autre que l'ancienne côte nord-est américaine : à moitié enfouie dans le sable, la statue de la Liberté est le seul vestige de la ville de New-York, disparue depuis longtemps. La planète sur laquelle les astronautes ont débarqué est bien la Terre.

Aujourd'hui, nous sommes à genoux sur la plage nous aussi, à l'instar des protagonistes du film.
La statue de la Liberté s'est corrodée puis désagrégée, et a fini par être emportée par les flots.

Plage blanche, c'est peut-être cette plage.
Plage blanche, c'est une plateforme web curatoriale ouverte, qui propose à chacun.e d'occuper l'espace-temps d'une minute, librement, avec le médium sonore. C'est une invitation à enregistrer, publier et/ou écouter une infinité de manières de « prendre part », via une unité temporelle d'usage courant dans le monde terrestre. C'est aussi une invitation à partager, à inviter à son tour un.e ou plusieur.e.s proches (quelque soit leur maîtrise de l'outil sonore) à diffuser leur singularité, comme autant de matériaux pour demain.

Note sur le design

L’économie de moyen est, dans Plage blanche, un parti pris esthétique. La contrainte agit comme un moteur créatif et le design s’expose à une conscience.
Ce type d’approche du design renouvelle les imaginaires.

L’interface du site a été conçue pour valoriser la contribution, notamment par l’importance accordée au formulaire, qui occupe un tiers de l’écran et de manière quasi omniprésente.

Elle alloue en revanche peu de place aux enrichissements graphiques, aucune à l’image.
L’espace du site est dédié au son, au texte et à la couleur. La couleur, tout autant que le son, caractérise chaque pièce sonore publiée. Le blanc est la couleur par défaut d’une page web (quant on ne lui attribue pas de couleur, le fond sera blanc). Tout comme l’est le papier de la page à écrire, tant qu’il est vierge de signes. En ce sens, Plage blanche est aussi une invitation à la couleur : on y laisse la sienne, au même titre qu’on y dépose une empreinte sonore.

Il y a aussi l’idée de passer du temps. Ça n’est pas forcément un problème de ne pas comprendre immédiatement le fonctionnement d’un site, ça dépend des enjeux.
Plage blanche est un site qui se flâne.

Nota bene

Par souci écologique, nous avons limité la taille des fichiers à 5Mo et avons adopté le format .mp3.
Si vous disposez d’un fichier sonore dans un autre format (.wav/.flac/.mpeg/.mov/.m4a/.aac/…) vous pouvez par exemple utiliser l’outil libre SoundConverter pour convertir votre fichier en mp3.

Crédits

Une proposition de Marine Froeliger, rendue possible et enrichie via la conception graphique et le développement de Marjorie Ober, 2021.

Licence de publication des créations sonores : Creative Commons CC BY-SA.
Fonte : Happy Times in the IKOB, Lucas Le Bihan, SIL Open Font License, Version 1.1, 2018.
CMS : GRAV

Contact : bonjour[at]marinefroeliger[point]fr